Plateforme Maladies Rares : focus sur les acteurs de l’écosystème
25 février 2022Aujourd’hui, les maladies rares concernent 3 millions de patients en France, avec plus de 7000 pathologies identifiées. Seule une personne sur deux atteinte d’une maladie rare dispose d’un diagnostic précis, qui est posé en moyenne après 5 ans d’errance pour plus d’1/4 des patients. En effet, la grande diversité et l’hétérogénéité clinique de ces pathologies (variabilité symptomatique, pronostique, etc…) complexifie drastiquement le diagnostic conduisant les patients à traverser des parcours de soins chaotiques dans l’attente d’un diagnostic.
En 2021, SimforHealth annonçait être sélectionnée par “Coalition Next” pour son projet de plateforme de simulation numérique de formation pour lutter contre l’errance diagnostique dans les maladies rares.
L’ambition de cette plateforme est d’associer l’ensemble des acteurs des maladies rares sur la co-création des contenus scientifiques et pédagogiques afin de répondre précisément aux besoins de formation des professionnels de santé.
Dans le cadre de ce projet, nous avons souhaité interroger les acteurs de l’écosystème des maladies rares pour recueillir leur point de vue sur la thématique et sur notre rôle d’agir conjointement pour être plus fort et plus impactant face aux problématiques qu’elles engendrent.
Olivier Mariotte, Médecin, Président de Nile
En France, les maladies rares concernent près d’un patient sur 20. Ce chiffre comparable à la prévalence du diabète montre que collectivement, les maladies rares ne sont « pas si rares que cela ». L’existence d’environ 7000 pathologies rares distinctes rend malheureusement le sujet complexe. Le problème qui persiste aujourd’hui est de pouvoir joindre les patients à ces structures de hautes technicités. Résoudre ce premier problème serait donner une clé pour rentrer dans le système de soin et donc de réduire l’errance diagnostique.
Si l’information des acteurs du soin primaire est capitale sur le sujet, la manière dont on aborde les choses l’est tout autant : on ne peut pas attendre des médecins généralistes qu’ils connaissent les 7000 pathologies en revanche, on peut les sensibiliser sur le sujet, et les aider à élever leur curiosité. Élever la curiosité, c’est la première étape clé pour des malades qui sont très souvent en situation de nomadisme médical et en quête de réponse. Si un professionnel de santé doute, s’interroge… » et si c’était une maladie rare ? « , il ouvre une première porte vers un parcours de soin qui débute enfin.
La place du digital est absolument fondamentale dans ce type de démarche. Ces outils permettent un accès lors de « temps de cerveau disponible » et limite les contraintes. La simulation numérique, approche moderne, interactive et non descendante, permet en plus des aspects médicaux, d’intégrer au travers de patients virtuels, des notions médico-sociales, psychologiques… Humaines!
La culture du doute, première module de formation de cette plateforme dédiée aux maladies rares est la réponse apportée à l’appel à projet « Améliorer le dépistage et le retard du diagnostic » portée par « Coalition Next » . L’objectif est de permettre le déploiement de contenus pédagogiques et scientifiques à visée d’information ou d’éducation dans le but de sensibiliser le réseau médical non spécialisé à la culture du doute dans le but de lutter contre l’errance diagnostique.
Le coeur de métier de Simforhealth est la formation et l’information par la simulation numérique des professionnels de santé. Depuis près de deux ans, nous travaillons à construire un projet de plateforme de simulation dédiée aux maladies rares, et découvrons un écosystème extrêmement soudé mais hétérogène (experts, associations, aidants, support de ressources et d’information) qui place toujours le patient au centre des préoccupations.
Au cours de nos échanges avec différents acteurs du domaine, nous nous sommes rendus compte que l’expertise était bien sûr nécessaire au traitement de ces pathologies, mais qu’une approche médicale holistique, qui va au delà de la technicité scientifique, est également essentielle.
Au fil des jours, nous avons l’opportunité de dialoguer avec ces acteurs afin de faire grandir ce projet, et de construire un outil qui nous l’espérons, sera utile au plus grand nombre.
Emmanuelle Gouot, Responsable de la coordination scientifique chez SimforHealth
Pr Roman Khonsari, Chirurgien Maxillo-facial pédiatrique – Hôpital Necker-Enfants Malades
Le système de prise en charge des patients atteints de maladies rares est très bien organisé en France autour des centres de références et de compétences. En revanche, les problématiques d’adressage sont fréquentes. Ce n’est pas le cas pour toutes les maladies rares dont un très grand nombre présentent des tableaux cliniques complexes et discrets, mais dans notre pratique, les signes cliniques se voient ! Les malformations cranio-faciales sont généralement repérées mais une mauvaise interprétation de ces signes cliniques ou un défaut d’adressage génèrent des retards dans la prise en charge adaptée des patients. Cela peut compromettre certaines fonctions primordiales chez l’enfant, voire même mettre sa vie en danger.
Le diagnostic d’une maladie rare nécessite des connaissances scientifiques précises, or du fait de leur rareté, peu de professionnels de santé peuvent les identifier. L’essentiel est d’acquérir les bons réflexes. Dans ce contexte, un outil digital de simulation peut s’avérer très adapté car il existe trop peu de moyens pour sensibiliser les professionnels de santé de première ligne.
Les outils qui simulent des situations réelles dans lesquelles se trouve le praticien quand il est confronté à ces maladies rares sont particulièrement utiles pour fournir une expérience réaliste proche du terrain clinique. Il ne s’agit pas de faire de la théorie sur les pathologies, mais de mettre l’accent de façon pratique et immersive sur les conduites à tenir et l’adressage au sein d’un réseau de soin structuré
Dans le domaine des maladies rares, il est important d’adopter les bons réflexes. Il faut d’abord y penser devant des antécédents familiaux, des signes cliniques ou métaboliques et bien sûr des anomalies des tests de dépistage en pédiatrie qui pourraient être développés. Ces doutes diagnostiques doivent être rapidement levés avec l’aide du numérique (banque de données d’associations de symptômes ou syndromes par exemple) et surtout aujourd’hui avec l’aide de l’Intelligence Artificielle.
La simulation numérique (et demain les jumeaux numériques) est un des moyens qui doit aider à préciser le diagnostic. La formation des professionnels de santé par ces méthodes pédagogiques est essentielle. L’utilisation de patients virtuels reproduits à partir de situations cliniques réelles a montré qu’elle améliorait le raisonnement clinique et la démarche diagnostique. L’entrainement régulier à ces techniques devrait aboutir à des orientations plus précoces vers des centres experts et donc une meilleure prise en charge de ces patients.
Pr Jean Claude Granry, Président d’Honneur de la Société Francophone de Simulation en Santé (SoFraSimS) et expert Simulation en santé HAS
La plateforme dédiée aux maladies rares de SimforHealth est une plateforme collaborative qui accueillera, à terme, une collection de simulateurs numériques adressant plusieurs pathologies sur les maladies rares actuellement connues.